CMJ n°6 - Max Jacob, Carnet d’Italie - Viaggio in Italia,

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Max JACOB, Carnet d’Italie - Viaggio in Italia,

a cura di Adriano MARCHETTI,
        Genova - Milano: Marietti éditore, 2004, 140 p. – édition bilingue français-italien
 

Le «Carnet d’Italie » vient d’être publié par les Éditions Marinetti i Rombi de Rome. L’édition italienne établie par Adriano Marchetti paraît donc avant l’édition complète française prévue pour bientôt par les Éditions de la Bibliothèque Municipale de Quimper. Max Jacob aurait-il trouvé cela regrettable ou ironique ? La publication est jolie, avec en couverture un fragment du dessin de Jacob intitulé «Lac italien». Cette édition bilingue donne le texte complet du manuscrit conservé à la bibliothèque de Quimper, avec en regard la traduction d’Adriano Marchetti. Il n’y a guère à dire sur la traduction, elle est indiscutablement excel- lente. Pour l’édition et la traduction du texte, Marchetti a apporté un soin minutieux, comme il le dit lui-même, aux détails du manuscrit, tous révélateurs «d’une écriture improvisée, sollicitée sur le vif par des impressions ».

Marchetti écrit «qu’il ne nous est pas donné de reconstruire avec exactitude le parcours du voyage »; mais il fait état dans une longue note du synopsis détaillé établi par Anne Kimball. L’ordre des textes, on le sait, ne suit pas la chronologie des déplacements de Max Jacob. La confrontation entre les dates établies et la position des chapitres dans le carnet pourrait donner des indications sur ce qui est commen- taires notés à chaud, souvenirs proches de quelques jours ou franchement postérieurs. Et qu’en est-il des pages qui suivent les notes de voyage, en particulier celles sur son personnage, Canamas ? Ces points restent non éclaircis. Dans le manuscrit, le carnet de voyage proprement dit est suivi de quelques poèmes et textes, dont seuls les premiers (jusqu’à Bellagio) font référence à l’Italie.

Marchetti a fait le choix de ne rien omettre du contenu du carnet ; il a maintenu les pages sur Canamas, les poèmes, les courtes notes, et a repris dans les notes les phrases griffonnées, les mots biffés, les variantes. Les notes de cette édition sont réparties en deux séries : celles concernant le texte manuscrit, en français ; celles de la traduction italienne, en italien. Ce parti pris défendable alourdit un peu la lecture et a l’inconvénient de priver le lecteur italien des notes sur le texte de MaxJacob, en particulier toutes les variantes relevées.

L’introduction en italien est rédigée con brio. La biographie de Jacob jusqu’en 1925, année de son voyage en Italie, soutient un superbe «essai » sur la construc- tion de l’homme, de sa pensée, de son élaboration poétique. Puis Marchetti retrace dans quel cadre de relations avec des artistes et des intellectuels italiens ce voyage s’est organisé puis déroulé. Max Jacob réside principalement chez Jean Grenier à Naples, chez Paul Petit à Rome. Les citations de lettres envoyées par Jacob à ses amis pendant et après son voyage expriment son enthousiasme, ses désillusions, «ses jugements hétérogènes et parfois contradictoires ».

Marchetti expose ce qui a façonné les «impressions d’Italie » de Max Jacob parmi ses paysages favoris, ses émotions, ses certitudes sur son écriture. En retour, ce que le voyage a apporté à ses écrits postérieurs, à sa prise de distance d’avec les diktats du Surréalisme, et ce que l’on sait qu’il n’a pas trouvé : le sujet du roman espéré.

Les impressions de Max Jacob s’égrènent, allegro vivace, phrases brèves, nota- tions fraîches, critiques, parfois mordantes, naïves – faussement ou sincèrement – émotions, qui «reflètent en général une extraordinaire indépendance d’esprit ». Difficile de ne pas paraphraser Marchetti tant il pointe avec justesse l’esprit, l’originalité de ce carnet de « touriste raté » comme se nomme Max Jacob. Citons-le plutôt : «Les observations au bord du paradoxe réservent toujours des pointes parfois déconcertantes mais d’une indubitable acuité et pleines de fraîcheur esthétique. » Un peu plus loin: «dans ses notes de voyage se fondent précision et impression, réalités géographiques et allégories spirituelles, inversion de l’objet et du sujet. »

Avant l’exposé des pérégrinations du manuscrit autographe et la description de son aspect physique, Marchetti conclut ainsi : « Ces pages ont le rythme et le brillant de l’improvisation; entre nature et artifice, il y a l’esquisse d’une réalité touchant à ce qui existe en soi, et celle d’un possible qui cherche à naître, à prendre consistance sous forme de poésie, à se montrer enfin aux lecteurs, inédit et révélé. » Un vrai bonheur de lecture que cette publication intégrale du Carnet d’Italie pour les admirateurs italiens de Max Jacob. Pour les Français aussi, à qui l’on souhaite de pénétrer dans l’introduction très fine d’Adriano Marchetti.

Marie-Claire Hériche

* Les citations du texte d’Adriano Marchetti ont été traduites par Marie-Hélène Viviani.

 
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Édités par l’association des Amis de Max Jacob, LES CAHIERS MAX JACOB — revue annuelle — sont publiés avec le concours du Ministère de la Culture et de la Communication-DRAC Centre, du Conseil Général du Loiret, de  la ville d’Orléans et de Quimper, de la Communauté de Communes Val d’Or-Forêt et du Centre National du Livre.

Les Cahiers Max Jacob sont présents chaque année, en octobre,  au Salon de la revue organisé par ENT’REVUES (espace des Blancs-Manteaux à Paris) grâce à l’aide de Livre Au Centre, agence régionale pour le livre en région Centre.